vendredi 20 février 2009

Que vaut le bio des grandes surfaces?

Info en provenance d'Alliance.

"Que vaut le bio des grandes surfaces ?


Auteur : Jean-Bernard Litzler (01/12/2008)

*****************
.

Les hypers sont-ils le fer de lance de la démocratisation du bio ? Ou au
contraire le signe d'une dégradation de la filière ? Réponse en cinq points.

• Les produits sont-ils vraiment bio ?

Oui. Avec la généralisation des produits bio jusque dans les enseignes
de hard discount, le doute s'instaure. S'agirait-il d'un bio au rabais,
voire d'un faux bio ? Aucune crainte. Pour être certifié bio, tout
produit doit être soumis au moins une fois par an à un contrôle (sur
rendez-vous) de l'un des six organismes certificateurs français
(EcoCert, Qualité France…). À cela peuvent s'ajouter des contrôles
inopinés et la vigilance de la Direction générale de la concurrence, de
la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF). L'organisme,
qui s'attache notamment à assurer la loyauté des appellations, a
rarement pris le bio en défaut. Depuis vingt-trois ans, la marque AB,
créée et gérée par le ministère de l'Agriculture, a prouvé son sérieux.
«Les accidents sont très rares, ce qui contribue à la solidité de la
marque», souligne Élisabeth Mercier, directrice de l'Agence Bio, chargée
de la promotion des produits bio.

Mais malgré leur sérieux, les la bels AB ou l'européen Agriculture
biologique, quasiment seuls présents en grandes surfaces, ne satisfont
pas tous les consommateurs. Les amateurs de bio les plus convaincus
estiment que ces appellations ne sont plus assez restrictives
aujourd'hui. Les produits portant cette mention peuvent par exemple
contenir jusqu'à 4,99 % d'ingrédients non biologiques et la présence
accidentelle d'OGM est autorisée à hauteur de 0,9 %. D'où le choix des
puristes de privilégier des labels privés (Demeter, Nature & Progrès…)
intégrant des exigences plus sé-vères.

• Affichent-ils les meilleurs prix ?

Souvent. Si 37 % des Français estiment normal de payer plus cher des
produits bio (sondage CSA/Agence bio), le prix reste un frein majeur au
développement de l'agriculture biologique. Or, la force de frappe des
grandes surfaces, c'est justement de proposer des marques de
distributeurs bio à des prix très proches de ceux des produits
conventionnels de qualité. Ce n'est donc pas un hasard si près des trois
quarts des acheteurs de produits bio se fournissent en super et
hypermarchés.

Malgré cette prédominance, les autres modes de distribution tirent
plutôt bien leur épingle du jeu (voir tableau), notamment pour les
produits frais. «Nous avons besoin de la grande distribution pour
écouler une partie de nos produits et tentons de développer avec elle
des partenariats, explique Henri Thépaut, président de la Fédération
nationale de l'agriculture biologique. Mais fondamentalement,
l'agriculture biologique est attachée aux circuits les plus courts :
vente locale ou directe.» Selon lui, ces réseaux courts permettent de
faire de bonnes affaires, mais «il s'agit de trouver un prix juste, pour
le consommateur et le producteur. La seule recherche d'un premier prix
est incompatible avec la démarche bio».

• Proposent-ils un large choix ?

De plus en plus. Présents depuis plus de dix ans sur ce créneau,
Monoprix et Carrefour ont développé les gammes les plus étoffées et
lorgnent désormais du côté des cosmétiques, des textiles et des produits
d'entretien. Le créneau est des plus porteurs puisque Monoprix a racheté
cet été la chaîne de produits bio Naturalia et ses 34 magasins, tandis
que Carrefour propose en France près de 250 produits bio sous sa marque
Agir et 1 400 références de marques nationales. Intermarché et Leclerc
n'ont pas tardé à suivre le mouvement. Quant aux derniers arrivés,
Auchan (en 2006) et U (fin 2007), ils tentent de rattraper leur retard
en proposant chacun une centaine de produits maison. Mais attention,
prévient le consultant Philippe Breton, spécialiste des marques de
distributeur : «Trop de choix tue le choix. À force de multiplier leur
nombre, les produits finissent par moins se vendre et l'attractivité des
prix pourrait s'en ressentir.»

De son côté, la distribution spécialisée reste sereine. «Le choix que
nous offrons croît plus vite que celui des grandes surfaces, souligne
Christian Lafaye. Tant que les consommateurs n'achètent que 2 ou 3
produits bio, ils se contentent des grandes surfaces. Au-delà, ils
préfèrent se tourner vers les spécialistes.» Reste un problème que ni
les grandes surfaces ni les magasins spécialisés n'ont réussi à résoudre
: viandes et poissons demeurent trop peu présents et trop coûteux.

• Quel goût ont-ils ?

Très variable. D'une manière générale, évaluer la qualité gustative des
produits est quasi impossible. Mais les chercheurs se penchent sur la
question. «Concernant les produits frais, notamment les pommes, les
pêches et les tomates, quelques résultats sont favorables au bio»,
relève Stéphane Bellon, coordinateur de la filière bio au sein de
l'INRA. Une irrigation et une utilisation d'azote plus modérée
permettent d'avoir des fruits plus fermes, plus sucrés et plus riches en
polyphénols. Des avantages que l'on ne perçoit pas forcément en grande
surface, pointe néanmoins le chercheur, si les récoltes ne sont pas
cueillies à maturité.

Quant aux produits transformés, ils ne peuvent pas être classés par
goût. Tout y est question «de conviction et d'espérance», selon
l'expression de la sociologue Claire Lamine dans son ouvrage Les
Intermittents du bio. Cela n'empêche pas les consommateurs d'affûter
leurs papilles et d'être attentifs à la composition des produits, très
variable d'une enseigne à l'autre, même en bio.

• La filière est-elle sans défauts ?

Non. Victime de son succès, le bio en grande surface menace de se
banaliser et de renouer avec les travers de la production classique.
Principal problème : la trop faible capacité de production actuelle et
la recherche de petits prix poussent à importer 50 % des produits. «Plus
de la moitié des fruits et légumes et 40 % de l'épicerie sèche
proviennent de nos voisins européens, du Maroc, de Turquie, voire de
beaucoup plus loin», admet Élisabeth Mercier, directrice de l'Agence
bio. Avec, à la clé, transport et dégagement de CO2 très peu
écologiques. La situation pourrait s'améliorer grâce au Grenelle de
l'environnement, qui fixe à 20 % (!) l'étendue de notre surface agricole
consacrée au bio, contre 2 % aujourd'hui.

Mais tout en relevant de bonnes initiatives, les agriculteurs bio
restent globalement méfiants vis-à-vis de leurs interlocuteurs des
grands magasins. Ils leur reprochent de trop se focaliser sur les prix.
Mais aussi de développer un marketing tous azimuts qui viderait de leur
sens les produits bio. Exemples : création de produits très «pointus»
(comme les chips bio aromatisées), suremballage (pour les fruits et
légumes ou les produits pour les enfants en portions individuelles) et
promotion à grand renfort de prospectus (même recyclés)."

Aucun commentaire:

/* Compteur Google Analytics*/ /* Fin de Compteur Google Analytics*/